LE PETIT CHAPERON UF, J.C. Grumberg
En ce moment, je fais des lectures-découvertes : après le manga, voici le tour du théâtre contemporain pour enfants ! C'est une vraie mine et je n'ai eu que l'embarras du choix à la médiathèque. Etant une inconditionnelle de toutes les réécritures du Petit chaperon rouge, je me suis décidée pour ce titre mystérieux : Le petit chaperon uf...
Alors que le petit chaperon rouge se rend chez sa mère-grand pour lui amener une galette et un petit pot de beurre, elle rencontre Wolf, un loup vêtu d'un costume de caporal. S'en suit une longue scène au cours de laquelle le petit chaperon rouge découvre qu'elle est Uf ; elle doit donc porter un horrible chapeon jaune et plus le rouge ! Ce n'est que le début d'une longue liste d'interdits que le caporal énonce bêtement sans être capable de justifier ces lois que le petit chaperon uf a bien du mal à comprendre...les scènes suivantes poursuivent la réécriture du conte de Perrault avec un dénouement surprenant et propre au théâtre contemporain qui aime la mise en abyme, la réflexion sur le théâtre et sa représentation. Cette pièce devient alors une ode à la liberté à travers sa dénonciation de l'intolérance.
Jean-Claude Grumberg a écrit une autre pièce dans laquelle il aborde ce thème de la seconde guerre mondiale : L'Atelier, une pièce autobiographique. La déportation de son père, tailleur, dans les camps d'extermination nazis en 1942, l'a beaucoup marqué : il n'a alors que 3 ans, et lui est son frère attendront en vain le retour de leur père. Malgré ce lourd passé, ce traumatisme, Grumberg ne verse pas dans le pathos, et est même capable de nous faire rire avec ce sujet.
J'ai découvert en m'intéressant à cet auteur qu'il était scénariste et qu'il avait reçu le prix du meilleur scénario pour le film Amen de Costa-Gavras.
Vous l'aurez compris j'ai vraiment apprécié cette pièce et je pense aller en lire d'autres de cet auteur ; d'ailleurs je lui laisse le mot de la fin, car son texte liminaire évoque toutes les raisons pour lesquelles on ne peut qu'aimer son livre :
"Connaître l’histoire, les
histoires, la vraie Histoire, à quoi cela sert-il ? Sinon à alerter les
chaperons d’aujourd’hui, à avertir les enfants que la liberté de traverser le
bois pour porter à sa mère-grand un pot de beurre et une galette n’est jamais
définitivement acquise… Cette liberté appartient à chacun et à tous. Hier ce
furent les enfants Ufs et Oufs, ainsi que leurs parents et grands-parents, qui
durent fuir, se cacher, changer de noms et de papiers afin d’échapper aux
griffes du loup. Un temps pas si vieux et pas si bon où les loups de noir ou de
vert vêtus pourchassaient des petits enfants – dont l’auteur faisait partie -,
les obligeant à porter du jaune afin d’être facilement reconnaissables. Leur
interdisant l’accès aux squares, aux piscines ou aux théâtres avant de casser
les portes de leurs parents, de dévorer leurs pères et mères-grand, ainsi que
des millions d’autres petits enfants ou adultes, simplement parce qu’ils
étaient nés Ufs ou Oufs.